Le capitaine Paul Watson, fondateur de Sea Shepherd Conservation Society, une organisation internationale à but non lucratif de conservation de la faune et de la flore marines basée aux États-Unis 501(c)(3), a déposé hier une requête auprès de la Commission interaméricaine pour les droits de l'homme (IAHRC) à Washington, D.C., accusant le Costa Rica d'utiliser le système judiciaire pour violer ses droits et faire échouer ses efforts de conservation. Si elle aboutit, cette requête pourrait mettre un terme à une longue bataille entre le capitaine Watson et le gouvernement du Costa Rica, notamment l'abandon de la notice rouge d’Interpol publiée en 2012, demandant son arrestation et son extradition.

Déposée par l'avocat costaricien Abraham Stern Feterman, la plainte allègue que le système judiciaire du Costa Rica a privé Paul Watson d'accès à la justice et a violé ses droits en termes de procès équitable et d'assistance consulaire. Maître Feterman déclare espérer que cette plainte marquera le début de la fin des problèmes de Paul Watson au Costa Rica.

"Le capitaine Watson a subi de nombreuses injustices entre les mains du gouvernement du Costa Rica, engagé depuis 13 ans dans une campagne à des fins politiques, visant à faire entrave à l'un des principaux défenseurs des océans et à protéger la lucrative activité de braconnage dans la région", a indiqué M. Feterman. "Nous avons hâte que justice soit faite et que le capitaine Watson soit disculpé de toutes les charges".

La plainte fait valoir que les "procédures judiciaires à l'encontre de Paul Watson [au] Costa Rica résultent directement d'une manœuvre politique destinée à faire obstacle à l'un des écologistes parmi les plus en vue et à laisser toute latitude au Costa Rica pour continuer son trafic d'ailerons de requins, une pratique qui porte atteinte à la stabilité environnementale de la planète et à l'équilibre naturel des écosystèmes marins".

Le gouvernement du Costa Rica a réclamé l'extradition de P. Watson sur la base d'un événement survenu en avril 2002. À l'époque, Paul Watson était capitaine de l'Ocean Warrior lorsqu'il a rencontré le Varadero I, un navire immatriculé au Costa Rica se livrant à des opérations illégales de pêche aux ailerons de requin dans les eaux guatémaltèques. Sous couvert de la loi guatémaltèque, P. Watson a tenté d'arrêter le Varadero I, mais les braconniers se sont dégagés et ont fui vers le Costa Rica.

Néanmoins, les autorités du Costa Rica ont porté plainte au pénal plus tard ce même mois, prétendant que P. Watson et son équipage avaient menacé et tenté de tuer les sept membres d'équipage du Varadero I, en plus d'endommager le navire. Cette plainte était fondée sur le témoignage fourni par l'équipage du Varadero I. Une fondation locale a assuré les services d'un avocat local au capitaine Watson, mais ni lui ni son avocat commis d’office n'ont reçu en temps utile la moindre notification concernant une audience préliminaire à ce propos en décembre 2002. Bien que les allégations de tentative de meurtre aient été abandonnées ultérieurement, sur la base du fait que le capitaine Watson ne se soit pas présenté devant le tribunal, la cour costaricienne l'a déclaré "rebelle" et a émis un mandat d'arrêt pour "violation du trafic maritime".

L'affaire a pris de l'ampleur le 13 mai 2012, lorsque les autorités allemandes ont arrêté P. Watson à Francfort sur cette accusation. Six semaines plus tard, le Costa Rica a présenté une demande d'extradition modifiée sur l'allégation de "mise en danger d’un navire et risque de naufrage", un délit beaucoup plus sérieux, généralement associé au terrorisme. Deux jours plus tard, les autorités japonaises ont officiellement demandé l'arrestation de P. Watson pour des faits de conspiration en rapport avec un incident datant de 2010, impliquant la campagne de Sea Shepherd pour mettre un terme à la chasse illégale à la baleine pratiquée par le Japon dans l'océan Austral. Au mois d'août 2012, Interpol a émis une notice rouge à l’encontre de Paul Watson sur l'accusation du Costa Rica de "mise en danger de naufrage".

La plainte portée hier déclare que les tribunaux du Costa Rica ont commis un certain nombre d’erreurs graves dans les poursuites judiciaires à l'encontre de P. Watson, notamment en ignorant le fait qu'ils ne sont pas compétents puisque les événements en question se sont produits dans les eaux guatémaltèques, on omettant d’informer P. Watson de son droit à une assistance consulaire et en permettant la poursuite de l'affaire jusqu'au procès sans aucune preuve valable.

La plainte fait suite à une demande de mesures conservatoires déposée par P. Watson auprès de l'IAHRC le 25 septembre 2015. Elle fait appel à l'IAHRC pour ouvrir une enquête afin de permettre à P. Watson d'établir la responsabilité du Costa Rica en termes de violation de ses droits en vertu de la Convention de La Haye et de la Convention de Vienne et d'ordonner au Costa Rica de payer réparations. La demande de mesures conservatoires peut être résolue au cours du mois de décembre 2015, alors que le traitement de la plainte contre le gouvernement du Costa Rica peut prendre des années.

"En 2002, je suis intervenu contre une opération de pêche aux ailerons de requin illégale documentée dans les eaux du Guatemala, à la demande du gouvernement guatémaltèque. Personne ne fut blessé lors de cette opération et le navire ne fut, en aucun cas, endommagé. C'est mon impact sur les bénéfices du braconnage qui a irrité certains individus bien placés. Nous avons déposé cette requête auprès de la Commission interaméricaine des droits de l'homme, car mes droits ont été violés dans le cadre d'une campagne à but politique, visant à faire obstacle à mes efforts de protection pour défendre des espèces marines menacées et en voie de disparition", a déclaré P. Watson.